17 Déc 2020

LR ou le début d’un frémissement libéral

Category: Leaders (politicards),Partis (politicards)Léo @ 16 h 22 min

Il y a longtemps que la droite républicaine a cédé aux sirènes socialistes. Nombreux sont ses leaders qui ont adopté sa fièvre étatique et keynésienne. Cependant, une petite révolte se fait jour en son sein, non sans difficultés…

La contagion socialiste est tellement aboutie que plusieurs caciques de LR prennent régulièrement parti pour l’actuel président Macron. Un président dont le gouvernement est pourtant largement constitué d’anciens membres d’un PS re-badgé pour l’occasion. Un président dont la politique s’adonne sans limite à la dépense publique tout en accumulant les preuves d’un blocage cataleptique dès qu’il s’agit de réformes structurelles.

Il semble toutefois qu’un léger frémissement se fait jour, qui incite les leaders historiques de LR à sortir du bois. L’énergie que ceux-ci déploient en effet pour tenter de casser le candidat Bruno Retailleau est un signe qui ne trompe pas. Ce n’est d’ailleurs pas sa personne qui agace au plus haut point ses ennemis déclarés de l’intérieur, mais probablement le programme dont il dessine progressivement les contours.

N’est-il pas terriblement révélateur que les proches de Sarkozy appellent les uns après les autres à une alliance avec Macron (Estrosi, Muselier) ou remettent carrément en doute la carrure du candidat Retailleau (Coppé) ? On peut même lire çà et là, dans les articles consacrés à la famille LR, que Retailleau ne pourra jamais rassembler derrière lui car son programme souffre des pires tares : trop libéral en économie, trop conservateur sur le plan sociétal. Il a même été dit et écrit que cela conduirait à reproduire à l’identique l’échec de la droite de 2017 ! Une telle farce frise bien évidemment l’indécence : on se doute très vite que la droite républicaine a d’autres objectifs derrière la tête pour laisser filtrer de telles aberrations…

LR, un parti a la mémoire sélective… de gauche

Considérer l’échec du candidat LR de la présidentielle de 2017 comme un rejet de son programme d’inspiration libérale confine au déni le plus absolu[1]. Sa victoire à la primaire (face à un Juppé qui s’était déjà préparé à séduire la gauche au second tour final) montre au contraire combien un programme pragmatique, construit pour lutter contre les blocages étatiques de la société française, a fait mouche.

Le non rejet des réformes libérales, qui est l’apanage des électeurs de LR, constitue donc un discriminant très fort vis-à-vis de l’électorat de la gauche, particulièrement réfractaire au libéralisme. Plus intéressant encore, ce non rejet fournit une fondation particulièrement solide sur laquelle la droite républicaine devrait construire sans difficulté son retour au pouvoir[2].

Or, il est particulièrement suspect qu’au 238 Rue de Vaugirard, personne n’ait encore saisi à bras le corps cette martingale, à la fois gagnante pour le pays (qui suffoque sous les réglementations et les impôts) et pour LR, seul parti à ce jour capable de pouvoir envisager une dose de libéralisme sans se mettre à dos son électorat, bien au contraire !

Les commentaires négatifs vis-à-vis de Retailleau vont donc bien plus loin que le candidat lui-même, et viseraient probablement tout candidat arborant le même positionnement. Mais ce qui est dénoncé comme libéral à LR l’est-il vraiment ? Et sont-ils vraiment nombreux à y pourfendre l’étatisme et le planisme ?

LR, le seul parti libéral… potentiellement

Lorsque l’on consulte le programme du sénateur de Vendée, parmi les nombreuses idées interventionnistes et souverainistes qu’il avance, on détecte tout de même quelques jolies pépites libérales. Elles méritent d’être soulignées : « pas de relocalisation sans reconquête de la compétitivité : c’est la baisse C3S (contribution sociale de solidarité des sociétés) et la suppression des charges au-delà de 1,6 fois le Smic » ; « Travailler un peu plus mais être mieux payé…/… en augmentant à 1700 heures de travail dans une année –  car l’annualisation du temps de travail, c’est mieux que sur une semaine de 35 heures. Ça correspond à une centaine d’heures en plus. Ce qui fait à peu près 37 heures en moyenne par semaine…/… dans la fonction publique, il faudra l’imposer » (Publicsenat.fr 16/06/20)…

A la lecture de propositions aussi iconoclastes[3], qui osent enfin aborder les douloureux problèmes de  compétitivité et de temps de travail, on se prend à rêver d’une réforme de l’Etat permettant de dégager des économies permettant à leur tour de libérer les forces vives hexagonales de leur enfer fiscal… Ce n’est certes que le début du commencement du crédo libéral tant attendu. Mais c’est un quasi miracle dans un pays comme la France, étatisé jusqu’à l’asphyxie budgétaire et entrepreneuriale. Au fait, combien sont-ils à oser tenir de tels propos au sein de la droite républicaine ?

Dans un parti à l’intérieur duquel, récemment, un Aurélien Pradié déclare : « on n’évitera pas d’interroger le libéralisme, c’est une évidence », on accuse  « le dogme budgétaire » et on se dit favorable à l’idée de « planification » (sic), tandis qu’un Guillaume Pelltier dénonce « quarante années d’échec du mondialisme financier » et « le malheur des peuples sacrifiés sur la seule logique des profits » (Figaro 8/04/20) on se demande en effet s’il y a la moindre différence entre LR et les socialistes du PS ou de LREM !

Cependant, d’autres voix se font entendre (dans ce même article du Figaro consacré aux libéraux de LR), dont celle de Nicolas Forissier, qui avoue ouvertement : « moi, je n’appartiens pas à un parti qui adopterait des thématiques très proches de ce que l’on entend parfois chez les gens de La France insoumise ».  Ou celle d’un Guillaume Larrivé : « si LR devient un nouveau PS, ce sera sans les Français qui, comme moi, cherchent à bâtir sérieusement, à droite, un projet national et libéral ».

Tous les espoirs sont également permis du côté de David Lisnard, maire de Cannes, qui, outre ses propositions pragmatiques à l’attention du gouvernement concernant la gestion du Covid, exprime sans détour idéologique les fléaux qui accablent notre pays : «  On a eu un excès de ce qui était bureaucratique, c’est-à-dire les auto-attestations, les autorisations de sortie. On est le seul pays d’Europe, où tous les jours on passe notre temps à faire de la bureaucratie… » (RTL 23/11/20).

Sans oublier Eric Woerth et ses prises de positions rares mais parfaitement en phase avec le fardeau socialiste hexagonal : « La France est le pays qui a les transferts sociaux les plus importants. Et c’est le pays où, probablement, le mécontentement social est le plus important. On pourrait avoir l’un ou l’autre. Or, on a les deux. Il y a un moment donné où il faut répondre à ce type de paradoxe » (BFMTV 6/09/20).

Hélas, ces ténors à la sensibilité libérale[4] le sont à titre individuel. Jamais la ligne du parti n’a jusqu’à présent ouvertement endossé leurs convictions. Bien sûr, LR est en reconstruction, mais la préparation des élections régionales ne peut justifier que de tels débats n’aient toujours pas été éclaircis.

Tout est donc possible, à savoir le pire, c’est-à-dire une ligne socialiste qui, actuellement majoritaire, réussisse à s’imposer officiellement. Ou le meilleur, avec enfin une ouverture du parti vers sa base électorale, qui elle, n’est pas du tout effarouchée par un programme proposant les réformes libérales dont le pays a tant besoin.

 

[1] L’élimination du candidat dès le premier tour est due à des causes parfaitement exogènes

[2] Ce n’est pas la seule fondation possible, mais elle est essentielle. La seconde est le conservatisme. Beaucoup d’analystes pensent que la solution pour le pays s’appelle le libéral-conservatisme

[3] N’oublions pas que nous sommes un pays parmi les plus étatisés du monde libre

[4] Liste non exhaustive

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